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Note 20 Nicaragua: Boys and Ice Cream
09.11.03
Masaya Envie d'un
bon lit, pas d'eau chaude, pas de connexion Internet ces
derniers jours. J'ai vu des endroits magnifiques, exclusifs,
hors des chemins touristiques (gringo trails) mais je suis
fatiguée, un passage de frontière prend pas mal d'énergie,
surtout le dimanche. Je vais directement à Masaya sans
m'arrêter à Esteli. Je pense retourner plus tard à Léon, ce
que finalement je ne ferai pas. En arrivant à Managua, je
demande à la police mon chemin vers Masaya. La police woman me
réclame directo les papiers du véhicule et mon permis de
conduire, me pose une série de questions pièges dont "avez
vous un triangle?". "C'est obligatoire au Nicaragua, l'amende
est de 300 Cordobas (ou 20 $)" et elle ajoute perverse, "si
vous voulez de l'aide vous devez m'aider", souriant de toutes
ses dents en or. L'info coûte cher dans le coin. J'arrive tout
juste du Honduras, ai été plus que contrôlée et je n'ai que 10
Cordobas sur moi, ce qui me reste des changeurs ambulants
après les impuestos, seguros, et tutti quanti
que l'on paie à la frontière. Les banques sont fermées, c'est
dimanche. Elle me montre les permis qu'elle a confisqué et me
dit (mais cela fait de la partie que je ne comprends plus
et/ou que je ne veux plus comprendre) que je dois revenir le
lendemain (80 km) payer les 300 cordobas et je récupérerai mes
papiers. Je lui fais répéter 1000 fois et elle abandonne dans
un soupir "no tiendes". Faut dire que mon permis international
est beaucoup plus grand que les permis d'ici et elle le
retourne dans tous les sens se demandant comment elle va
l'entrer dans sa petite enveloppe jaune. Pour un exemple, voir
la photo sur le site de Didier (ci dessous les boys) http://www.ride4kids.t2u.com/, qui a eu
moins de chance. A Masaya, je séjourne à l'hôtel Régis, tenu
par un très gentil monsieur, une mine d'informations, une
énorme petit déjeuner. Je me promène sur les marchés de
Masaya, le meilleur endroit pour l'artisanat et les fameux
hamacs. Comme au Guatemala, je suis abordée par les
vendeurs "¿Que busca?, ¿que busca?" ici ils ajoutent "mi
amor". Je cherche un triangle pour la voiture, sans
succès.
10.11.03 GranadaGranada est le
Antigua (voir note 14) du Nicaragua, au pied du volcan
Mombacho et au bord du Lac Nicaragua. L'air du lac
s'engouffre dans les patios des maisons coloniales, dont les
portes restent ouvertes.
Le Nicaragua, la patrie de Ruben Dario,
est la destination la moins touristique d'Amérique Centrale,
le pays le plus pauvre. En 1972, un tremblement de terre fait
6.000 morts et laisse 300.000 personnes sans abri. En 1978, la
révolution gronde et les sandinistes prennent le pouvoir le 17
juillet 79. Ils ont redistribué les terres prises par les
Somozas et appris à lire à la population. En 1981, le
gouvernement US intervient, craignant les alliances entre le
Nicaragua, Cuba et d'autres pays communistes, faisant des
dizaines de milliers de morts (voir ci-dessus Honduras
08.11.03). Dans la redistribution, les sandinistes se seraient
servis en premier, Ortega habitait dans un château, Tomas
Borges avait une maison à Miami. Aux élections de 2001, Ortega
perd son mandat de président mais je comprends que les
sandinistes ont toujours de l'influence au gouvernement. Lors
de l'ouragan Mitch, 2.800 nicaraguayens ont été tués.
Plusieurs ONG sont présentes pour travailler entre autres à la
reconstruction.
A l'auberge de jeunesse de Granada affluent les
backpackers et les surfers, la planche sous le bras (dans le
bus, les gens leur demandent si c'est un avion), le Nicaragua
étant moins cher que le Costa Rica. Il y a de très jolies
filles, des surfeuses, jeunes, dorées par le soleil.
C'est aussi ici que je
rencontre les boys:
Steffen, d'Allemagne, que j'ai croisé à Copan, qui descend
d'Alaska à Ushuaia sur une KTM 640, Didier franco-australien
qui est sur les routes sur sa BMW 740 depuis l'Australie, et
passant par l'Afrique, l'Europe, la Russie, la Mongolie et
Albert Oöstereich sur ses derniers papiers (les douanes mixant
un peu tout), qui conduit une Honda 750 Africa
Twin. Steffen et moi, on a fait la route plusieurs fois
le même jour depuis le Mexique: il a rencontré les japonais à
vélo, a du faire demi tour après les Cabos pour rejoindre la
Paz, a vu le bus en travers de la route entre Oaxaca et Tuxtla
et a été le premier à passer sur le pont en fer de secours
avant Tuxtla alors que j'étais bloquée pendant 3 heures dans
la file. Didier a un beau projet, il roule pour Worldvision,
une association qui parraine des enfants à travers la monde.
Il fait de magnifiques photos que l'on peut voir sur son site
http://www.ride4kids.t2u.com/. Albert,
les cheveux longs "look Amérique Centrale" il me dit, est
moniteur de ski à Zurs, il voyage en Asie, en Australie, en
Afrique. La
question à 10 cordobas des riders est "comment envoies-tu l'auto
à partir du Panama?". J'ai ma petite idée, j'ai envoyé des
demandes de cotation, mais je comptais être sur place pour me
rendre compte. Ils me font découvrir le site
perso de motards http://www.horizonsunlimited.com/ qui est
une mine d'info. J'ai par
contre de gros soucis pour la mise à jour du site au
Nicaragua, aucune diskette ne fonctionne, je rédige
mentalement un email annonçant l'interruption de la diffusion
des notes. Steffen, IT, me donne un coup de
main.
Pour dormir: The
Bearded Monkey http://www.thebeardedmonkey.com/ est une
auberge de jeunesse pleine de bonnes idées: dortoirs à 3 $,
échange de livres, prêt de guides, hamacs dans le patio,
billard, films le soir, accès Internet, happy hours, laundry,
excursions, on peut graver la musique qu'on écoute, parking
pour les motos... Pour
lire: Desperados, de Joseph O'Connor. Phébus Libretto, un road
book: des parents irlandais à travers le Nicaragua pour
retrouver leur fils supposé "mort" et engagé dans la
révolution sandiniste.
12.11.03
Laguna de Apoyo Entre Masaya et Granada, la Laguna de
Apoyo est le plus grand cratère-lagon du Nicaragua. J'y passe
la journée, nageant, regardant les singes et photographiant
les oiseaux depuis la terrasse du Monkey Hut, le jumeau du
Bearded Monkey. Les proprios organisent une petite soirée avec
leurs copains de Granada, je suis de la partie et mise dans
l'ambiance avec des cuba libre et un BBQ. La soirée se
poursuit tard dans la nuit.
13.11.03
Lago de Nicaragua Dans le série des "plus",
le Lac Nicaragua est un des plus grands du monde. C'est le
seul endroit où on trouve encore des requins d'eau douce. Au
milieu, l'Ile d'Ometepe, aux deux volcans. Il y a un (petit)
ferry qui part de Rivas pour l'île à 9.30AM. Mais il n'y a pas
de place pour la voiture, seulement 2 camions et 2 autos
peuvent y embarquer, il faut réserver 3 jours à l'avance. On
me dit d'attendre, au cas où quelqu'un ne viendrait pas. Je
songe aller à San Juan del Sur à 40 km et revenir dans 3
jours. Et puis il y a une série de coïncidences: les boys
arrivent sur leur moto, ils obtiennent leur ticket pour le
ferry de 9.30AM mais finalement ils ne pourront pas monter à
bord, leur barda prenant trop de place. Le prochain est à
2.30PM, qui sait il y aura peut-être un désistement pour moi.
A défaut, je pourrais venir avec eux, laisser la voiture dans
le parking de l'embarcadère et monter sur la moto d'Albert.
Qui aurait refusé? L'île d'Ometepe en moto, les cheveux au
vent, accrochée à Apollon. On n'aura pas le ferry de 2.30PM
non plus, plein à craquer. On campe devant l'arrivée du bateau
pour être sûrs de prendre le dernier de la journée à 5.30PM.
Ce n'est pas le jour de Didier qui se fait voler son argent au
resto en moins d'une minute d'inattention. Je leur montre mon
faux portefeuille fait de vieux dinars yougoslaves et
d'euro-chèques qui n'existent plus. Albert nous raconte que
pour traverser le fleuve entre le Sénégal et le Mali, il a
embarqué sur une pirogue de 6 m de long mais si étroite qu'il
a du rester assis sur la moto pendant tout le trajet pour la
tenir en équilibre. D'histoires en musiques et en jouant à
Rami, le dernier ferry arrive. Les motos doivent descendre
dans la soute, par une petite trappe en fer qui s'incline,
c'est tellement bas qu'ils sont obligés de baisser la tête
pour entrer. A la sortie, c'est l'enfer, la cale est
surchauffée, la fumée sort par la trappe, il fait au moins
100°. Il fait noir et on ne peut pas rouler, on
s'installe à l'Hospedaje Centrale à Moyogalpa, juste à
l'arrivée du bateau. Ils ont une logique très pragmatique des
voyageurs de longue durée qui est "Pourquoi payer plus si on
peut trouver moins cher?": dortoir à 2 $ (les clients
peuvent payer en laissant leur peinture au mur), gallo pinto
(riz et haricots rouges) pour se caler l'estomac, pains au
sucre fourrés à la banane au petit déjeuner, grandes bières
que l'on partage. Et chaque jour, on craque pour une glace
doble! Mon budget a du descendre à < 5$ certains
jours. Albert aimerait ouvrir un jour une auberge de jeunesse
petit budget, free Internet, communitary kitchen, sports et
excursions, peut-être en Nouvelle-Zélande. *
Sur la photo de gauche à droite: Albert,
moi, Didier, Steffen
14.11.03 Isla de Ometepe- Volcan La
Conception Levés
aux aurores, on part en moto pour rejoindre le bas du volcan
la Conception. Les poules et les chiens courent dans tous les
sens devant nous. Albert est un excellent pilote, très sûr
de lui, la piste est exécrable, il y a des pierres de lave et
du sable et avec une passagère en plus, il ne peut pas se
mettre debout. Cela lui coûtera un rétroviseur et une éraflure
au pied.
On a décidé de faire
l'escalade par nous-même, sans guide. On demande notre chemin
aux gens que l'on rencontre dans les champs. Le volcan la
Conception est haut de 1610m, il est parfaitement conique et
toujours en activité. Un petit nuage est accroché au sommet.
On commence l'escalade, les garçons ont une bonne cadence,
l'ascension est raide. Après 1 heure sans s'arrêter, je
décroche, je suis trempée couverte de sueur et leur dis que je
vais continuer à mon rythme. On est à 600m. Le vent devient de
plus en plus fort. Ils vont devoir renoncer avant le sommet.
Ils ont filmé là haut, Didier est en pleine tempête, tout est
balayé par le vent, la visibilité est nulle. En descendant, on
voit des singes hurleurs.
J'apprends... sur ma NOT TO
DO list, inscrire: ne pas laisser son pique-nique hors de son
sac à dos, les pains ont disparu pendant la nuit, mangés par
une bête ou l'autre.
15.11.03 Isla de Ometepe-
Fête patronale
San Diego d'Altagracia Il y a
une fête ce WE à AltaGracia pour la San Diego. Sur la route,
des équipes de filles jouent au foot. On s'arrête dans des
petits villages. J'aime leur façon d'approcher les gens, en
espagnol, leur tact, sans en faire trop. On croise des hommes
qui montent leurs bœufs, on boit un coca dans une gargote qui
rassemble les habitants devant une TV. Mon appareil photo ne
fonctionne plus, l'objectif est grippé. A Altagracia, la foule
se presse pour le rodéo. On est surpris par le nombre de
travestis que l'on croise, sans vraiment trouver une
explication. J'ai l'impression de reconnaître les vêtements
que les gens portent ici. Une ONG (Oxfam?) distribue sans
doute des secondes mains, les T-Shirt sont logoïsés Pattex,
Exxon, Pokémon, les Lakers. Je "recycle" une chemise hawaïenne
à 20 cordobas (1,25 $), étant arrivée sur l'île avec les
seules choses que je portais sur moi. Les bœufs ne sont pas
très en forme, il y a même une vachette, le public est dans
l'arène, essayant de réveiller les bêtes en mordant dans leur
queue.
16.11.03 Dimanche, repos: Didier
rédige, Albert étudie l'espagnol, Steffen regarde HBO à la TV
cablée, je lis. Il y a du passage dans le dortoir, outre les
chiens et les chats, un namurois avec une casquette Standard
de Liège et un japonais polyglotte qui nous parle tour à tour
en allemand, français, espagnol et qui me lance un
moien. Un petit monde.
17.11.03 On reste le lundi pour la procession à
Altagracia, les gens défilent avec des palmes et des feuilles,
en portant la statue de San Diego. Shake my body again sur les
routes défoncées de l'île. Après, on va voir les belles plages
de Santo Domingo, on est déçu. Au retour, 2e chute de moto,
comme la 1ère presque à l'arrêt, sans aucun dommage pour moi.
Albert a le pied coincé sous la moto. On rentre en trombe,
j'ai un lifting for free, je tiens à peine debout quand je
descends de la moto tellement mes genoux
tremblent.
18.11.03 San Juan del
Sur A la frontière
entre le Nicaragua et le Costa Rica, c'est la plage côté
pacifique où tout le monde se retrouve. On rejoint Rachel et
Simon, de Londres, rencontrés à Copan. Ils voyagent depuis
2000 en moto à travers le monde, parfois Rachel retourne
travailler à Londres et ensuite rejoint Simon sur la route.
Pete, de Berkeley, un de leurs copains, est à San Juan aussi.
On s'installe dans une belle grande chambre, avec un plancher
et on négocie la cuisine dans le prix. Comme cela, Didier nous
prépare un délicieux rice pudding, promis depuis un petit
temps.
19.11.03 Refugio de Vida Silvestre La
Flor On ira voir les
tortues pondre leurs oeufs, sur la plage de la Flor à 20 km de
San Juan. On part en 4x4 à la tombée de la nuit, et dans la
série des"plus", c'est la piste la plus défoncée que j'ai eue.
Ce jour là, j'ai rêvé d'avoir une voiture surhaussée et un
extra-pneu. Je dois viser entre des rigoles profondes, un peu
comme au Car-Wash et passer plusieurs cours d'eau. On est
assez excité, tout le monde descend pour me guider et pour
alléger la voiture. A chaque trou, on se lève instinctivement
sur notre siège comme si cela pouvait aider. C'est un travail
d'équipe, à la réserve, Rachel et Albert négocient le billet
d'entrée assez élevé pour la 1/2 de son prix. On attendra
jusque 10 heures du soir sur la plage à chercher les tortues
et à regarder les étoiles avant d'en voir une pondre ses
oeufs. C'est un moment magique pour moi, les oeufs sont comme
des balles de ping pong, elle en pond 80 à 100, 80 % écloront
après 45 jours. Elle referme le trou avec ses pattes arrières
et retourne à la mer guidée par la lumière sur l'eau. Il
paraît que les petites tortues reviennent 7 ans plus tard
exactement sur la plage où elles sont nées. On a dû changer un
pneu crevé entretemps et on prend le chemin du retour,
toujours guidée par les copilotes. Ce soir là, j'ai
l'impression de m'endormir un peu plus
savante.
21.11.03Didier, Steffen, Simon et
Rachel repartent vers le Costa Rica. Je m'entraîne à changer
le pneu, réparé pour 35 cordobas (2$)! Je vais rester encore
quelque jours le temps d'écrire les notes. Entre les coupures
d'électricité, je rédige jusque midi et puis avec Albert, on
va manger du poisson au marché avec les gens de passage,
Andréa et Christian des canadiens, Pete, des australiens qui
n'ont pas dormi de la nuit pour suivre le match de rugby
contre l'Angleterre. On est allé se balader à la plage de
Maderas, à mettre dans la série des plages paradisiaques, et
jeter un coup d'œil aux maisons à vendre de San Juan.
L'architecture est très (trop) contemporaine, des maisons en
bois, ou rose, une en forme de bateau, style Malibu Beach.
L'épaisseur des fils barbelés pour les protéger me laisse
perplexe.
Chacun reprendra sa route:
Didier, Simon et peut-être Rachel vont passer par la Colombie,
ils aimeraient être à Panama dans une semaine. Didier n'est
pas intéressé par les plages, il préfère l'Equateur au Costa
Rica. Albert retourne mi-décembre en Autriche pour donner ses
cours de ski et continuera son trip en avril-mai 2004. Steffen
et Pete parlent de contourner la Colombie, ils cherchent un
moyen d'envoyer leur moto en Equateur à partir du Panama. Moi,
j'ai d'autres projets ...
Et qui sait, on va peut-être
fêter Noël ensemble? En tout cas, je ne voyagerai plus de la
même façon.
Catherine, Nicaragua, le 24
novembre 2003.
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